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Héraldique
: le bestiaire
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Les animaux sont, avec les formes géométriques,
les premières figures héraldiques. Plus tard viendront
les végétaux, les objets et les monuments.
Au XIe siècle, juste avant l'apparition
de l'héraldique, les combattants décorent déjà
leurs imposants boucliers en amande de figures animales. Mais
on ne peut pas encore parler de figures héraldiques,
car elles ne sont soumises à aucune règle. En
outre, au XIe siècle, les emblèmes utilisés
ne sont pas héréditaires. Ils sont individuels
et le guerrier en change au gré de ses envies et des
modes.
Lorsqu'apparaissent les premières
règles de couleurs et de composition formant l'héraldique,
les combattants reprennent naturellement les figures animales
dont ils avaient coutume d'orner leurs écus et les plient
aux exigences du nouveau système : limitation du nombre
de couleurs et de positions, principalement.
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Pendant
la période médiévale, seule une trentaine
d'espèces sont rep-résentées dans les armoiries.
Le lion est l'animal le plus fréquent. Il est présent
sur environ 15% des armoiries. |
Le
succès du lion ne fut jamais démenti. Animal noble
et courageux parmi tous, locataire in-détrônable
des ménageries royales et princières du Moyen
Âge, il est l'animal héraldique par excellence.
Son dessin, comme celui des autres animaux, est toujours très
stylisé. A cela une raison simple : sur les champs de
batailles comme de tournois, il fallait pouvoir identifier à
coup sûr et du premier coup d'oeil (à travers les
fentes du casque) les emblèmes figurés sur les
boucliers. En conséquence, les caractéristiques
physiques des animaux furent exagérées : langue,
griffes, queue, etc. Cette raison explique également
la règle des couleurs, qui interdit certaines combinaisons
: s'il est interdit de poser une figure bleue sur un fond vert,
c'est avant tout pour une question de visibilité. De
loin, une figure bleue se verra beaucoup plus facile-ment sur
un fond jaune ou blanc que sur un fond vert ou noir.
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La
couleur des animaux, de même que leur dessin, n'est en
rien naturaliste. Sur l'image de droite, un chevalier porte
un écu orné d'une tête de loup de couleur
verte (sur fond jaune, respectant ainsi la règle des
couleurs).
Le
loup est relativement peu fréquent en héraldique.
Les animaux que l'on rencontre le plus souvent sont le lion,
la merlette (un petit oiseau sans pattes), l'aigle, le léopard
(c'est-à-dire un lion portant la tête de face),
le cerf et le sanglier. Ce dernier est, avec l'ours, le dragon
et la panthère, un des tout premiers animaux héraldiques.
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Il
arrive que les animaux ne soient pas représentés
en entier dans l'écu. Cette aigle, par exemple (aigle
est un nom féminin en héraldique), sera dite "issante",
car elle semble sortir de la partie inférieure de l'écu.
La langue héraldique est d'une
précision et d'une concision redoutables. En une phrase,
elle permet de décrire un écu sans erreur possible.
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Pour
prendre un exemple simple, l'écu au loup ci-dessus à
droite se blasonnera comme suit : "D'or, à la tête
de loup coupée de sinople, lampassée de gueules."
"D'or"
signifie que le fond de l'écu est jaune, "coupée"
signifie que la section de la tête est nette, "de
sinople" signifie que la tête du loup est verte,
"lampassée" désigne la couleur de sa
langue, "de gueules", c'est-à-dire rouge. Remarquez
l'absence de verbe, caractéristique de la phrase héraldique
et servant sa concision.
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Les animaux
imaginaires tels que la licorne et le griffon sont très rares
en héraldique. Mais l'aigle et le lion héraldiques sont-ils
moins imaginaires que ces créatures ? Il est permis
d'en douter. Le lion, archétype de l'animal héraldique,
n'est pas véritablement un lion. Ce serait plutôt une
idée de lion, qui sert de véhicule à des valeurs
toutes humaines (vaillance au combat, noblesse, magnanimité
...).
L'animal
héraldique est avant tout un moyen de communiquer. Il sert
d'enveloppe à un message...
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Cela se
vérifie d'ailleurs par le graphisme détourné
des animaux en héraldique, qu'ils soient lions, léopards,
dauphins ou panthères. Puisque nous parlons de panthère,
pourquoi ne pas faire connaissance avec cette demoiselle ? Plus encore
que
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les autres animaux, elle est différente de son homonyme zoologique.
De dimensions imposantes, elle ressemble à une sorte de dragon,
avec un corps puissant, un cou fort et recourbé. Elle porte généralement
des cornes de taureau et crache du feu. Ses pattes, tour à tour
d'aigle ou de lion, sont toujours griffues, sa queue est celle d'un
mammifère. La panthère héraldique est originaire
de Styrie, une province autrichienne (Steiermark, en allemand)
qui fut autrefois un duché. Son aire de répartition est
très limitée. On la trouve |
surtout
dans les armoiries d'Allemagne méridionale et d'Autriche. Elle
ne doit pas être confondue avec la panthère britannique
apparue après le Moyen Âge, d'aspect beaucoup plus naturaliste.
De manière
générale, le bestiaire héraldique anglo-saxon
est sensiblement différent du bestiaire continental, plus "classique".
Certains animaux sont ainsi spécifiquement anglo-saxons : c'est
le cas de la panthère britannique, qui n'a jamais traversé
la Manche, du tigre, du léopard naturaliste (appelé
leopard en Angleterre, alors que le léopard se dit lion
passant guardant. Bien peu cartésien, tout ça),
etc. À leur décharge, ces animaux sont apparus après
ou à la fin du Moyen Âge, donc tardivement, et ne figurent
géné-ralement pas dans l'écu mais en support,
c'est-à-dire qu'ils sont situés de part et d'autre de
l'écu, comme s'ils le tenaient...
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Panthère
de Styrie (XIIIe s.)
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